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Doenjang, la pâte du bonheur

Produit fermentaire d’exception, la pâte de soja fermentée est un élément essentiel de la cuisine coréenne. Utilisée comme simple assaisonnement ou parfois mixée avec du piment, de l’ail, de l’huile de sésame, vous trouverez toujours de la pâte de soja sur la table du repas ou dans votre plat.

Le Doenjang, Meju, le malt de Soja ©Arnaud Vojinovic

Le Doenjang, Meju, le malt de Soja ©Arnaud Vojinovic

Pâte utilisée telle quelle ou comme base à de nombreux assaisonnements, la doenjang (된장) est obtenue par la fermentation du soja sur des périodes très longues. Placée dans des jarres à l’extérieur des habitations, au fil des saisons le processus de maturation et de fermentation se fait lentement et peut prendre des années ; les moines veillant avec attention sur ce processus naturel. Dans les temps anciens, les moines évitaient d’approcher tout ce qui était impur ou impropre trois jours durant afin de se purifier avant d’approcher la pâte de soja.

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Doenjang ©Songgwangsa

Fabrication de la pâte de soja fermentée :

Le soja est une plante facile à cultiver en Chine, Corée et Japon. A défaut de viande, elle constitue une source importante de protéines. Pour faciliter la digestibilité des protéines, le soja est cuit. Il est ensuite broyé, pressé et mis au soleil où débute la fermentation. Le processus de fermentation est un mode de conservation pour les périodes chaudes et humides de l’été. Dans un second temps, le soja pressé sera mis en jarre de pierre où débutera une seconde fermentation pouvant durer plusieurs années.
Solide et liquide sont séparés ; ce dernier donnera naissance à la sauce de soja.
Si le travail du soja est commun au trois pays de la région, seule la Corée est arrivée à l’excellence dans le processus de fermentation. Attestée dès l’époque des trois royaumes de Corée, la pâte sert alors d’assaisonnement à presque tous les repas.

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Jarres de pierre à l’arrière d’une maison traditionnelle dans lesquelles s’élabore au fil des saisons le long processus de fermentation et de maturation. ©Arnaud Vojinovic

Lors de la colonisation de la péninsule coréenne par le Japon, les japonais ont imposé une industrialisation de la production. Afin de raccourcir le délai de fermentation, il était ajouté à la préparation des céréales telles que du riz, du blé ou encore de l’orge. Il faudra attendre la fin de la guerre de Corée et le besoin d’une consommation de masse à bas coûts pour que ce procédé se généralise. Avec des arômes moins marqués, le goût original de la pâte de soja s’est perdu pour beaucoup.

Depuis une quinzaine d’années, on note un retour vers une fabrication artisanale à base uniquement de soja. Les monastères bouddhistes ou catholiques qui ont su garder la tradition d’une fabrication artisanale, ont été des acteurs essentiels à ce renouveau. Même si l’essentiel de la production est industriel avec un goût fade (certaines marques vendues en France contenant plus de farine de blé que de soja) et s’écoule en supermarchés, la fabrication traditionnelle avec des temps de fermentation beaucoup plus longs et au goût plus prononcé est de plus en plus recherchée. Il faut compter entre 4 à 7 ans de fermentation pour obtenir un produit de grandes qualités. Les esthètes s’approvisionnent auprès des grands magasins de luxe (par exemple SSG Food Market propose de la pâte fermentée « bio ») ou auprès de monastères.

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Doenjang, la pâte de soja fermentée. ©Cultural Corps of Korean Buddhism

Très appréciée par les Coréens, on attribue à la pâte de soja fermentée cinq vertus :

- Elle garde sa saveur même si elle est mélangée avec d’autres saveurs.
- Elle se conserve longtemps.
- Elle élimine les odeurs fétides ou les odeurs de gras.
- Elle adoucit la saveur piquante.
- Elle s’harmonise avec tous les mets.

La pâte de soja fermentée a de plus, une teneur en fibres supérieure à celles des légumes. Du fait qu’elle contienne de l’acide linoléique elle a des effets anticancéreux et facilite la réparation des cellules ; elle a ainsi un impact pour traiter la constipation, le cancer du pancréas et l’hypertension artérielle.
Il n’existe pas qu’un seul type de pâte, mais une multitude selon le temps de fermentation. Plus la fermentation est longue, plus la doenjang s’assombrit et les saveurs développées sont de plus en plus complexes. Ainsi certaines pâtes fermentées plus de cinq ans vont développer en bouche des saveurs rappelant étrangement la framboise.

La pâte de soja fermentée en cuisine :

La pâte est utilisée dans de nombreux plats comme les ragouts, des sauces relevées, des soupes ou comme condiment lorsqu'on se fabrique ses bouchées avec une feuille de laitue, un peu de viande et du riz. Son goût est tellement reconnaissable et donne une telle sensation en bouche que la pâte est parfois appelée la nourriture de l’âme.
Le petit plus : il existe un ragoût, le Cheonggukjang (청국장), fait à partir de soja fermenté, mais dont la fermentation a duré à peine quelques jours. Si c’est un ragoût très apprécié l’hiver, pour son apport en vitamines et nutriments, son goût très fort n’en fait pas le plat préféré pour beaucoup.


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