L’établissement (01) – à l’enseigne ancienne d’un marchand de vins, ce qui est de bon augure - est niché dans un endroit au charme désuet : le plus ancien passage couvert de Paris, ouvert en 1799-1800 sur les Grands Boulevards, entre la Bourse et l’Opéra, en vis-à-vis du musée Grévin.
"Racines" est un restaurant bien plus qu’un bar à vins ou un caviste, où l’on se sent un peu à l’étroit, avec quelques tables resserrées pour un peu plus d’une vingtaine de couverts, outre quelques tables à l’extérieur. On sera donc avisé en réservant.
tant que l’on est à table, on ne vieillit pas
La décoration à l’ancienne est simple : des tables et chaises en bois, un carrelage usé, quelques miroirs, un zinc d’époque où l’on aimerait pouvoir s’accouder et y accrocher son mousqueton. Les lieux sont peu éclairés nonobstant la verrière du passage et la devanture vitrée décorée de bouteilles. Tout ceci confère à ce repère gourmand un côté intime et chaleureux. On s’y détend et - qui plus est - on peut y prendre son temps ! Autant dès lors profiter de l’adage selon lequel « tant que l’on est à table, on ne vieillit pas ».
L’accueil est décontracté. Entrez en oubliant toute velléité d’être pète sec pour profiter pleinement de la restauration française dispensée depuis la cuisine ouverte.
En guise de menu, une courte carte à l’ardoise : 2 à 4 entrées, 2-3 plats, autant de desserts, laquelle change très souvent au gré des saisons, des envies du cuisinier et des offres du marché.
La qualité des produits est irréprochable, qui plus est bellement présentés. Ils sont mis en avant plutôt que travaillés.
Cette cuisine de terroir est un retour aux basiques : simple, sans fioriture, mais soignée et précise. La simplicité a du bon. Outre le fait d’être goûteux, les plats sont roboratifs : on ne mégote pas sur les quantités.
Pas de carte des vins : les bouteilles sont alignées aux murs. N’hésitez pas à demander conseil, les maîtres des lieux connaissent leur sujet. Au-delà du prix caviste, il vous sera réclamé un droit de bouchon de 12 euros.
La sélection – pointue – est composée uniquement de vins bio ou ‘nature’.
On se délecte d’un magnum de Volnay 2010 de Sarnin et Berrux sur un veau de lait. Ce vin tout en dentelle fut carafé et servi aux tables voisines, en toute simplicité : pour le plaisir de faire découvrir. D’un Cheverny blanc 2011 "Les Perrières" de Christian Venier, tout en "gouleyance’" gras, minéral, accompagnant admirablement des tourteaux. D’un riesling nature 2012 de Jean-Pierre Rietsch "entrelaçant" les papilles sur un boudin noir poêlé de chez Parra (12€) accompagné de mesclun. Ou encore d’un Montlouis-sur-Loire 2001 "Singulier" de Lise et Bertrand Jousset, droit et franc sur un Comté affiné 36 mois.
Lors de la dernière visite, le choix s’est porté sur une très belle terrine de canard mi-sauvage et foie gras, coings, oignons (15 €) et une savoureuse fricassée de girolles et coquillages, espuma de langoustine (16€), le tout accompagné d’un vin de France blanc 2011 Le Pressoir de Saint-Pierre de « La Grapperie » : un chenin qui se "mâche". Ont suivi une croustillante poule faisane de chasse, céleris, épinards (21€) et un tendre gigot d’agneau de lait, pommes de terre, échalotes, pissenlits (26 €) accompagnés d’un Collioure rouge 2012 du domaine « Le Temps Retrouvé » : un vin exubérant, puissant, très long tout à fait à sa place dans le repas mais qui peut se suffire à lui-même.
Et si besoin est, pour finir d’étancher sa soif, pourquoi ne pas se laisser tenter par une petite pépite en provenance d’une brasserie de la région parisienne : la bière "Indigo India Pale Ale" de Deck et Donohue.
S’il fallait en terminer sur un mode concis, ce serait en ces termes : salle exigüe, carte réduite pour une cuisine maximale.
S’il fallait en terminer sur mode littéraire ce serait Racine dans « Athalie » : "Hâtons-nous aujourd’hui de jouir de la vie. Qui sait si nous serons demain ? ".
(01) A ne pas confondre avec Racines 2 à 75001 Paris, rue de l’Arbre Sec.
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