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Interview de Christophe Vasseur, artisan-boulanger

La mie de l’amitié à la boulangerie "Du Pain et des Idées"

christophe vasseur boulanger à paris ®Ludovic Le Guyader

christophe vasseur boulanger à paris ®Ludovic Le Guyader

La boulangerie « Du Pain et des Idées » a fêté son dixième anniversaire le 23 février 2012 célébrant par la même occasion un parcours hors du commun, celui de Christophe Vasseur.

« Cela fait dix ans que je me suis installé et ça reste du grand bonheur. Je ne regrette pas un moment ma reconversion. Je suis comblé par ce que j’ai vécu et si cela devait s’arrêter demain, ce ne serait pas grave ! ».

C’est ainsi que Christophe Vasseur débute l’entretien, accoudé au comptoir du bistrot face à sa belle boulangerie dans le 10ème arrondissement parisien, tout près du Canal Saint Martin. Cette boulangerie existe depuis 1875, sa devanture est classée et il a tenu à la rénover entièrement « pour lui rendre son âme, lui redonner un cachet de boulangerie à l’ancienne », avec lettres en or sur les vitrines, étals de pains et de viennoiseries dans des paniers.

« Je vous ferai un pain comme vous n’en avez jamais vu et dans ce pain il y aura de l’amour et aussi beaucoup d’amitié », fameuse réplique de Raimu dans « La femme du boulanger » sur la porte d’entrée résume son projet et donne le ton.

« Fasciné par la matière », Christophe Vasseur a profité d’une rupture professionnelle dans le domaine du marketing pour se lancer dans l’aventure et revenir à son envie première : devenir boulanger. « C’est un rêve de gosse éveillé et qui continue ! ». Un projet dont la consécration sera l’appel téléphonique d’Alain Ducasse il y a un an et demi, lui commandant son pain pour le Plaza Athénée. Il n’en revient toujours pas ! Philippe Conteccini (champion du monde de pâtisserie en 2003 et qui dirige aujourd’hui les pâtisseries Pelletier à New York et Tokyo mais est également l’heureux fondateur de la Pâtisserie des Rêves à Paris) lui, a poussé sa porte dix jours plus tôt.« Il faisait la queue comme n’importe quel client. Pour moi, c’était comme si le Père Noël arrivait dans ma boutique ! Il m’a dévalisé. Nous avons beaucoup parlé. C’était une belle rencontre » confie-t-il. 

Comment définissez-vous votre métier ?

C’est un métier de magicien. Un boulanger ne se contente pas de nourrir, il donne de l’émotion. Un vrai artisan transforme la matière en y mettant tout son talent, son art, son âme pour en faire un produit unique. Nous vivons dans un monde d’uniformisation. Or, pour mille artisans, il y a mille produits différents. Chaque produit est unique et il est la signature de son œuvre.

Quel ingrédient vous inspire le plus ?

La farine bien sûr ! Mais aussi les fruits et les épices.

Dans votre métier, c’est jamais sans mon… ?

Tablier !

Un souvenir, une rencontre qui vous a marquée ?

La plus belle, sans hésitation, celle d’un monsieur très âgé qui est entré un jour dans ma boutique et m’a pris dans ses bras. « Des amis nous avaient parlé de vous et ma femme m’a apporté un sac la semaine dernière qui contenait votre pain ». Son grand-père était boulanger, parti trop tôt alors qu’il n’avait que 7 ans. Il était très proche de lui et se souvenait de tout. En ouvrant le sac à pain, il a tout retrouvé : « Vous m’avez ressuscité  mon papet ! » lui a avoué le vieil homme ému.
C’est un souvenir fabuleux d’avoir pu générer une émotion aussi forte et qu’il soit venu me le dire !

christophe vasseur boulanger à paris ®Ludovic Le Guyader

La recette dont vous êtes le plus fier ?

Le pain des amis ! Il n’est fait qu’avec de la farine de blé, mais le processus est long et délicat. Il redonne ses lettres de noblesse à la boulangerie artisanale. Ce pain, c’est le pain que je faisais à mes amis le week-end et j’y mettais tout ! Puis mes amis m'ont demandé s’ils ne pouvaient pas le trouver également en semaine, alors j'ai commencé à le fabriquer pour la boulangerie. C’est le pain choisi par Ducasse. Il est typé, unique, original. C’est un pain signature.

Votre accord parfait ?

Le pain des amis, mais la croute du dessous, la plus toastée, torréfiée, qui a un arôme de bois, de biscotte, avec du chocolat noir. En souvenir des années de pensionnat où je m’échappais pour acheter le pain cuit au feu de bois du boulanger en face.

Que trouve-t-on toujours dans votre frigo ?

Du lait Gaborit. Le meilleur. Il est fabriqué en biodynamie, issu de vaches jersieyses. Je l’utilise pour réaliser les crèmes pâtissières et les riz au lait. Mais on y trouve aussi de l’eau minérale, des fromages fermiers, des oeufs, du beurre et une terrine ou un pâté, pour les premiers secours !

Et dans votre placard ?

Cinq ou six sortes de pâtes et de riz. Des produits de producteurs toujours, pas forcément labélisés bio, mais issu d’une agriculture respectueuse de l’environnement. Trois ou quatre sortes de sucres. Je n’achète jamais de conserves. Je fais beaucoup de cuisine, principalement des légumes, car on ne mange de la viande qu’une fois par semaine. Et, indispensable, une bonne bouteille de vin pour le repas du dimanche, c’est sacré !

Le pain des amis par christophe vasseur boulanger à paris ®Ludovic Le Guyader

Votre pêché mignon ?

Les profiteroles, les Saint Honoré, la mousse aux fraises. Je suis très gourmand, depuis tout petit.

Une recette culte en famille ?

Les pâtes de ma grand-mère, faites maison, des tortellini ricotta-épinards que l’on préparait pour Pacques.

Quel plat aimez-vous qu’on vous prépare ?

Un riz au lait ou un pot au feu.

Si vous deviez donnez une astuce de boulanger ?

Il faut chauffer le découpoir au chalumeau juste avant d’étaler la pâte à croissants pour qu’elle ne colle pas. Si on le farine, ça n’apporte rien en terme de goût et ça terni la pâte à la cuisson.

Vos meilleures adresses gourmandes ?

 La pâtisserie des Rêves de Philippe Conteccini pour le Saint Honoré et le Paris Brest. Il les a sublimés et revisités avec son coulant de praliné ».
93 rue du Bac - 75007 Paris et 111 rue de Longchamp - 75016 Paris et sur le site de la Pâtisserie des rêves

La Pâtisserie Pain de Sucre, de Didier Mathray et Nathalie Robert pour leurs Mille Feuilles à la vanille et le Baba au Rhum : « Cultissimes !»
14 rue Rambuteau - 75003 Paris et sur le site de la patisserie pain de sucre

La viande de chez Yves-Marie le Bourdonnec à Asnières. Je la commande à l’avance.
Le Couteau d’Argent 4 rue Maurice Bokanowski 92600 Asnières
Tél.: 01 47 93 86 37 - Pour la côte de bœuf, réservation obligatoire.

En fromage, Bernard Antony pour son vieux Comté.
« Sundgauer Käs-kaller »17, rue de la Montagne - 68480 Vieux-Ferrette

La Crémerie du Lac à Annecy pour son Reblochon et aussi son vieux Comté, le seul à rivaliser avec celui de Bernard Anthony.
3 rue du Lac – 74000 Annecy - site internet la cremerie du lac

L’épicerie Israël où je vais à la pêche des épices oubliées. Ils ont aussi un très grand choix d’huiles et de vinaigres qu’on ne trouve nulle part ailleurs.
30 Rue Francois Miron - 75004 Paris


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