On ne présente plus le chef Yves Camdeborde, dénominateur commun de cette bande dessinée croquée par Jacques Ferrandez sous forme d’un reportage gastronomique réalisé pendant plus d’un an aux quatre coins de la France épicurienne.
Camdeborde signale d’emblée : « … je n’existe que parce qu’il y a les autres autour de moi… Ce que j’appelle ma chaîne alimentaire… Ils travaillent avec le souci du goût, la qualité du produit et le respect des sols, des saisons et de l’environnement. Ils font partager leur passion pour leur métier… Ils ont quelque chose à transmettre (…) A l’origine d’une belle table, il y a une longue chaîne d’artisans qui s’activent saison après saison ».
La plupart du temps le récit évoque donc ses fournisseurs - souvent de longue date - auxquels le chef est allé rendre visite, fournisseurs devenus entre temps amis. Et ils sont nombreux : cuisiniers, artisans des métiers de bouche, éleveurs, paysans, pêcheurs, vignerons, apiculteurs, maraîchers, mareyeurs, ostréiculteurs… J’en passe et des meilleurs, tous passionnés par leur métier.
Parmi les vignerons – outre l’hommage à feu Marcel Lapierre et Philippe Laurent – pointons Hervé et Isabelle Villemade (le domaine du Moulin), Thierry et Jean-Marie Puzelat (clos du Tue Bœuf) ainsi qu’Emeline et Sébastien Bobinet dans la Loire, Charles Hours à Jurançon ou encore Maxime Magnon, vigneron dans les Corbières.
S’avère par ailleurs techniquement très instructif le passage consacré à Yves Charles (les couteaux Perceval), producteur entre autre du couteau de table "9.47".
Mais outre les personnes, ce sont aussi des lieux que l’on découvre via ce voyage culinaire, tel Salies-de-Béarn et son sel de la terre ou le vignoble de la Côte-Rôtie et son renouveau.
Parfois, l’ouvrage s’écarte de sa ligne de conduite.
Il nous plonge ainsi dans l’expérience de Camdeborde à l’occasion d’un atelier de cuisine mené en prison.
Quoique n’étant pas fournisseur, l’ouvrage s’étend d’autre part longuement sur les théories du boulanger-pâtissier Alex Croquet, telle la dynamisation de l’eau par lui utilisée.
Autour des personnages centraux gravitent tant d’autres, tranches de vie sources d’anecdotes qui sont elles aussi autant de portes à ouvrir, d’envies de rencontre.
Un bémol cependant : la trame, les textes sont parfois décousus. Sans doute la volonté de reproduire aussi fidèlement que possible ce qui devaient être à l’origine des discussions à bâtons rompus.
Peu importe ! Comme le signale Sébastien Lapaque dans la préface du tome 1, nous avons entre les mains « … une bande dessinée qui donne faim et soif ».
Effectivement : cet hommage à l’artisanat français ouvre l’appétence de la découverte du beau, du bon. Il met en exergue le goût du bien manger, des produits de qualité, avec une question qui revient de manière récurrente dans la deuxième partie : bio ? Pas bio ?
Il valorise – notamment - le circuit-court, la patience, la fraîcheur, le respect de l’environnement et de ses cycles, et tant d’autres valeurs. Ainsi le beurrier-fromager Jean-Yves Bordier insiste sur la nécessité d’ « arriver à inclure les savoir-faire traditionnels dans les modes de production modernes… Restituer, Perpétuer », ce à quoi Antoine Arena, vigneron à Patrimonio, fait écho : « garder le passé et vivre avec son temps ».
Cerises sur autant de gâteaux : quelques recettes mettent en valeur les produits relatés dans les deux tomes, avec un conseil quant au vin d’accompagnement.
Un ouvrage que les gourmets feuilletteront en se pourléchant les doigts !
Se décline en deux volumes : Le tome 1 : hiver & printemps et le tome 2 : été & automne.
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