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A la table Néron, l’empereur fan des poireaux !

Un voyage dans le passé gourmand d'un empereur à la réputation sulfureuse, qui pour protéger sa voix devint un consommateur les premiers « alicaments ».

A la table Néron, l’empereur fan des poireaux !

A la table Néron, l’empereur fan des poireaux !

Néron, la légende noire

Accusé d’avoir tué mère et femme, d’avoir mis le feu à Rome et de se goinfrer dans des orgies gargantuesques, cette « légende noire » lui colle à la peau depuis des siècles. Mais derrière ce portrait dressé au vitriol pour ternir sa réputation, de récentes découvertes prouvent que ces rumeurs ne sont pas toutes fondées. Ces nouveaux éléments permettent aux historiens de dresser un portrait un peu plus flatteur, plus proche de la réalité, d’un homme aimé de son peuple à qui il redonna « des jeux et du pain », un passionné des arts et surtout du chant qu’il pratiquait et pour lequel il s’astreignait une « diététique » stricte.

Son pêché mignon, les poireaux !

Loin de l’image des festins opulents, Néron faisait des cures de poireaux. Il pensait que l’usage prolongé de ce régime austère rendait sa voix plus nette et plus pure. Il les adorait et pouvait en ingurgiter de grandes quantités. Son contemporain, le naturaliste Pline (23 à 79 A. J-C) raconte qu’il les dévorait tout cru, au mieux à l’huile, voracement, sans pain, l’empereur croquant dedans comme d’autres dans une pomme.

A la table de Néron

Le nom de Néron est étroitement lié aux débauches de nourriture pratiquées sur les tables impériales. Suétone raconte qu’il faisait durer ses banquets de midi à minuit, sûrement pour insister sur son mode de vie totalement déréglé. Des descriptions de repas gargantuesques, d’orgies, qui doivent être lues avec précaution mais qui permettent de se rendre compte de la quantité phénoménale d’aliments qui pouvait entrer dans ses menus princiers, son raffinement et sa capacité à rassembler les produits tant de Mésopotamie que des territoires lointains sous domination romaine.

Au Menu de Néron :

Gustatio
Œufs
Choux, céleri, brocoli, asperges, radis, navets, poireau
Huîtres
Fruits de mer,
Escargots.
Servis avec un vin miellé, le mulsum
La prima mensa (première table)
Légumes
Volailles et petits oiseaux rôtis.
Porc en sauce
Agneau salé
Sardines et thon grillés
Quenelles
Servis avec un vin coupé à l’eau.
La secunda mensa (« seconde table »)
Figues, raisins, poires
Gâteau de fromage
Olives et lupins

 La cenatio rotunda, une des folies de l'empereur

La découverte de vestiges de la salle à manger tournante de la Domus Aurea «Maison dorée » a permis aux archéologues d’établir sa reconstitution. « La salle à manger principale, qui était ronde, tournait jour et nuit sur elle-même, en imitant le mouvement du monde » décrite par Suétone trônait bien en haut d’une tour sur les pentes du Palatin. Un pilier central de 4m de large supportait une salle ronde tournante pour festoyer avec vue imprenable sur Rome. Une folie qui lui valut les foudres de la noblesse.

Infos pour se coucher moins bête

Céna, nom donné au repas principal des riches Romains. Rythmé en trois services il se prend le soir dans le triniclum, en position semi allongé sur des banquettes, accoudé sur des gros coussins, la main droite servant à attraper les aliments découpés et servis par les esclaves.

3 questions à Dimitri Tilloi-d’Ambrosi, agrégé d’histoire

Pourquoi vous êtes intéressé aux repas des romains ?
Je réalise une thèse sur la diététique au temps des romains et du coup les éditions Arkhé m’ont proposé de réaliser un ouvrage sur la gastronomie des romains. L’alimentation permet d’aborder différents aspects de cette société, économiques, culturels, philosophiques voire médicales avec les prémices de la diététique.

Quel mangeur était Néron ?
Il aimait faire bonne chère, mais les descriptions faites des banquets noircissent le trait. On sait qu’il faisait attention à ce qu’il mangeait, était adepte des cures de poireaux et accordait de l’importance à la provenance des produits. D’ailleurs à l’époque tous les légumes sont considérés comme des alicaments et le poireau comme la panacée.

En dehors du repas principal comment se nourrissaient les Romains ?
Le petit-déjeuner (jentaculum) et le déjeuner (prandium) étaient simples et frugaux. Pris rapidement, il s’agissait plus d’en-cas. Au petit-déjeuner, les restes du dîner de la veille pouvaient être mangés, et sinon pour les deux on mange du pain, des légumes, des fruits, du fromage et on boit du vin. Le midi à Rome on pouvait manger dans une taverne ou dans ce que l’on appelle (un peu à tort) un « thermopolium », une sorte de fast-food à l’Antique où l’on grignotait au comptoir.

L’Empire Romain par le Menu, Dimitri Tilloi-D’Ambrosi, Les Editions Arkhé, 18,90 €


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